L’inceste

L'inceste

Des personnes médiatisées, victimes d’inceste, ont dernièrement dit tout haut ce qu’elles subissaient tout bas. Ces personnes ouvrent la « voix » à d’autres victimes, qui, pour la première fois s’autorisent à dénoncer ce tabou si profond dans notre société.

Une victime parle en moyenne 15 ans après les faits (la prescription est à ce jour de 30 ans après la majorité de la victime).

La société doit désormais prendre ses responsabilités, et entendre ce qui est si dur à accepter : l’inceste. Pourquoi est-ce si compliqué pour la société (voisins, école, association, administration, etc.), de libérer la parole ? Sûrement car cela vient bousculer nos fragilités et nous renvoi à deux thèmes sacrés : la famille et la sexualité.

Mais les enfants abusés, les victimes, dans tout ça ? quelles sont leurs places ? comment arrivent-t-ils à dépasser ce traumatisme ? Sont-ils condamnés à être victimes ?

L’inceste : Dénoncer  

Dans la société

Inceste et societe

Voici la définition, à ce jour, de l’inceste selon le code pénal :

« Les viols et les agressions sexuelles sont qualifiés d’incestueux lorsqu’ils sont commis au sein de la famille sur la personne d’un mineur par un ascendant, un frère, une sœur ou par toute autre personne, y compris s’il s’agit d’un concubin d’un membre de la famille, ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait. »

Loi visant à lutter contre l’inceste sur les mineurs

La législation est là pour condamner cet interdit et mettre fin à l’impunité de l’agresseur. Elle doit rétablir le statut de chacun, celui de la victime et du bourreau. Ce qui est une étape essentielle pour la reconstruction de l’enfant abusé.

En revanche force est de constater qu’une fois ce premier pas de fait, les procédures sont longues et éprouvantes. Il est très difficile pour les victimes de relater les faits à chaque étape de la procédure. Une enquête a démontré qu’une victime doit exposer les faits au moins 7 fois, ce qui est un vrai frein.

La justice a un réel effort à faire afin d’alléger les procédures. Mais avant d’en arriver à la justice, il y a l’étape déterminante de la dénonciation.

L’encadrement de l’enfant a un rôle primordial. On le sait, dans le huis clos familial la chape de plomb empêche toute fuite du « secret », c’est donc aux institutions qui encadrent l’enfant, de prendre le relais.

S’interroger si un enfant a un changement d’attitude, s’il ne parle plus, s’il devient agressif etc. Un enfant est pour la plupart du temps encadré par : son école, un médecin de famille, une association.

Autant de personnes qui doivent être attentives à tout changement qui survient chez l’enfant. Ces personnes ont une responsabilité, un engagement envers les enfants.

Dans la famille

Inceste et la famille

Mais le plus difficile à accepter pour ces enfants abusés, l’ultime tragédie, c’est le silence de la mère. Celle qui devait les protéger, est souvent dans le déni. Reconnaitre l’inceste, le viol, c’est souvent reconnaitre sa faille, sa vulnérabilité, sa non-légitimité de mère. Cela crée un trauma familial sur chaque membre de la famille.

Il faut se poser la question pourquoi cette mère sacrifie son enfant ? Après une thérapie en psycho généalogique (étude de l’histoire familiale) on découvre souvent que cette mère « permissive » a été victime elle-même d’inceste ou est dans une carence psycho-affective.

L’enfant vit donc deux abandons : le père abuseur et la mère qui cautionne. Voilà pourquoi il est si difficile pour ses enfants abusés de parler. A qui parler quand nos deux tuteurs nous abandonnent ?

L’enfant est dans une posture impossible : dénoncer celui/celle qui devait le protéger. Cela le met dans un conflit de loyauté et dans l’insécurité. Il passe par le déni, comment accepter que son parent lui fasse du mal ? Ce parent qui est l’Unique, le seul être d’amour. La faille est terrible.

D’où l’importance de poser l’interdit de l’inceste. Cet interdit va émerger à l’âge de l’Œdipe, quand l’enfant est attiré par le parent du sexe opposé, c’est bien évidement un désir inconscient. Ce désir, n’est pas à confondre avec les pulsions sexuelles que l’on ressent une fois adulte. C’est là que le parent doit poser l’interdit. Cette étape est primordiale pour le développement de l’enfant, elle va le structurer avec ce que l’on peut faire et ce que l’on ne peut pas faire. Et cela est nécessaire dans une société, de connaitre les interdits, sinon nous tombons dans l’anarchie.

« L’interdit de l’inceste est nécessaire à la structuration des sociétés humaines. »

Claude Levi Strauss

L’inceste : Se reconstruire

Mécanismes de défense : Instinct de survie

Inceste et reconstruction

L’enfant, qui devait trouver la sécurité et l’amour inconditionnel au sein de sa famille, se retrouve la proie de celle-ci.

Le trauma est si violent qu’il crée comme une agonie psychique, une mort. Il est soumis à un stress que son « petit » corps ne sait pas gérer. Des études neurologiques démontrent que l’enfant subit les mêmes sensations physiques que lorsque nous sommes en danger de mort, or là il ne peut pas s’enfuir. Ce qui va laisser des lésions neurologiques et l’amener à un état de sidération post-traumatique qui le laisse sans voix.

Les victimes d’inceste, une fois adultes, vont pour essayer de survivre, mettre en place des mécanismes de défense afin de refouler et donc de se protéger. Inconsciemment, elles préfèrent parfois se mettre en danger que d’accepter cette réalité trop violente. Certaines victimes peuvent aller jusqu’au suicide, tellement la douleur est vive.

Quelques mécanismes de défenses :

  • L’homosexualité, l’aversion pour l’autre sexe qui a été bourreau
  • Déni
  • Dissociation
  • Dépréciation
  • TAC (Troubles des conduites alimentaires)
  • Addiction aux substances
  • Addiction au sexe
  • Scarification

Ces mécanismes, issus du refoulement par l’inconscient, vont permettent aux victimes de survivre tant bien que mal. Cela jusqu’au jour où un événement arrive, comme une déception amoureuse, un licenciement, une naissance un deuil, et va faire émerger le trauma de l’inceste.

Le moment est venu pour la thérapie

Inceste et thérapie

Lorsque cet évènement déclenche la levée de l’amnésie ou du déni, il sera très important d’être accompagné, par un thérapeute (psychanalyste/psychologue). Au fil des séances il faudra travailler sur la part de sentiment de honte. Car on le sait, l’enfant abusé ressent la honte, lui sait que c’est interdit, que ce n’est « pas normal ». C’est un sentiment de honte irrationnel. L’enfant attendait de la tendresse, de l’attention et il reçoit de la violence sexuelle, d’où ce sentiment de culpabilité.

Dans ce long processus, Il est primordial que l’adulte qui consulte soit entendu, écouté, mais pas seulement. En effet, l’une des clefs de l’affranchissement de cette pénible étape, est de redonner la place à son enfant intérieur, celui qui a subi, qu’il soit entendu et reconnu comme victime.

L’enfant, lui, a été victime, mais l’adulte qu’il est devenu, a ce « pouvoir » de changer ce statut et de vivre sa vie du mieux qu’il peut.

Le but d’une thérapie n’est pas de nier le trauma ou de faire comme si rien n’était arrivé. Au contraire, c’est de faire remonter le trauma, l’assimiler pour enfin pouvoir vivre sans souffrir.

Je voudrais vous dire combien je suis admirative, de ces enfants qui n’ont pas été protégés par l’Adulte, et qui arrivent après bien des combats, à trouver un équilibre et disons le …une certaine résilience. Ils sont abîmés …pas détruits.

« Personne ne prétend que la résilience est une recette du bonheur. C’est une stratégie de lutte contre le malheur qui permet d’arracher du plaisir à vivre, malgré le murmure des fantômes au fond de sa mémoire »

Boris Cyrulnik

Je vous remercie et prenez soin de vous

LYDIE GRAL

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